La transformation économique amorcée il y a 30 ans a modifié profondément le paysage productif. Les entreprises, en se spécialisant, délèguent aujourd’hui une partie de leurs activités à des partenaires externes. Elles "font faire", "font produire" pour se recentrer sur leur cœur de métier. Cette dynamique donne lieu à des échanges inter-entreprises, ou Business to Business (B2B), autour de la commande et de la fabrication de pièces destinées à s'intégrer dans un ensemble global.
Désormais, l’entreprise opère dans un écosystème complexe combinant des collaborateurs internes et des partenaires externes. Cet écosystème inclut : fournisseurs, sous-traitants, clients directs et indirects, représentants, franchisés, distributeurs, consultants, startups, bureaux d’études, et prestataires de services.
Les parties prenantes collaborent dans le cadre de projets communs, souvent structurés autour de deux types de regroupements :
Un exemple notable est celui de Dassault Aviation, pionnier en la matière. Afin de réduire ses besoins en main-d’œuvre, l'entreprise s’appuie sur un réseau de fournisseurs avec lesquels il partagent une même base de données.
Ainsi est né le concept d’entreprise étendue, d’entreprise en réseau ou encore d’entreprise complexe.
Depuis les années 2010, la révolution numérique a joué un rôle déterminant dans l’essor de ce modèle collaboratif. Avec la digitalisation des échanges, l’information circule à une vitesse inégalée, créant un environnement propice à la coopération inter-organisationnelle.
Les avantages sont nombreux :
Un exemple emblématique est celui du secteur nucléaire, caractérisé par une chaîne complexe de donneurs d’ordres et de sous-traitants (parfois jusqu’à 3000 partenaires). Ces acteurs, issus de disciplines variées et réglementées, interviennent tout au long du cycle de vie des systèmes complexes. Dans un tel contexte, l’entreprise ne peut qu’être étendue.
Il y a 3 ans déjà dans une interview de la SFEN, Corinne Spilios, ex-directrice de la performance chez ORANO et présidente de la Commission numérique du GIFEN, a souligné les particularités du secteur nucléaire : « La gestion de la complexité, les temps longs et le volume d’informations généré constituent ses principales spécificités. » Elle a mis en avant la notion de continuité numérique, définie comme « la capacité à accéder à toutes les informations relatives à un produit tout au long de son cycle de vie via les technologies numériques » dans un article du Journal des Entreprises. L’objectif est d’instaurer une dynamique collective favorisant une performance d’ensemble.
Cependant, dans un secteur aussi sensible, les données partagées doivent être sécurisées et les autorisations adaptées. Les points critiques incluent :
Au sein de cet écosystème collaboratif, l’entreprise pilote joue un rôle central. Elle coordonne les projets, distribue les rôles, partage les informations et définit les autorisations pour les fournisseurs, partenaires, clients ou filiales. En tant que leader, elle donne le ton et assure le respect des intérêts convergents.
Pour remplir ce rôle, elle s’appuie sur des outils numériques performants garantissant la traçabilité des données et la standardisation des procédures. Le Cloud Computing, par exemple, offre une infrastructure où « les applications et les données ne se trouvent plus sur un ordinateur unique mais dans un nuage (cloud) composé de nombreux serveurs distants interconnectés », selon la CNIL.
Des technologies comme Connected Industry© by olome renforcent la coordination entre les parties prenantes en facilitant le partage d’informations et l’homogénéisation de la culture numérique. Ces outils permettent aux PME et TPE, souvent en retard sur la transformation numérique, de rattraper leur retard et de rivaliser avec les grands groupes souvent à la pointe des dernières technologies.
L’entreprise étendue représente une évolution majeure dans la façon de concevoir les organisations modernes. Favorisée par le numérique, elle repose sur une collaboration fluide entre partenaires internes et externes, permettant d’améliorer la performance et l’agilité tout en réduisant les coûts.
Cependant, ce modèle n’est pas exempt de défis : la gestion des données sensibles, la cybersécurité et la coordination des écosystèmes complexes demeurent des enjeux majeurs. En s’appuyant sur des outils numériques avancés et une stratégie claire, les entreprises peuvent tirer parti des avantages de ce modèle tout en minimisant ses risques. Ainsi, l’entreprise étendue s’impose comme un levier de compétitivité indispensable dans un monde où l’innovation et la collaboration sont plus que jamais cruciales.